Le rôle des architectes locaux
Certains architectes, comme les frères Leseine très actifs à Colombes à partir des années 1890, parviennent à produire des maisons de qualité pour un coût assez modeste.Cela est essentiellement rendu possible grâce à l’apparition de la vente de maisons sur catalogue, impliquant la reproduction quasi identique d’un même modèle (ou d’un même plan) et l’industrialisation des techniques de construction. L’emploi de la céramique décorative produite par les industriels et l’utilisation de matériaux moins couteux, comme la brique, permettent de réaliser des maisons à des coûts maîtrisés.
L'historienne Catherine Jubelin-Boulmer résume en quelques lignes la méthode de Leseine, représentative de l’apparition des modèle-types, et qui rend compte de l’émergence d’une nouvelle clientèle. Elle met en évidence leur créativité et aussi leur habileté économique :
«Ils construisent le plus souvent des maisons très modestes, de taille réduite, sur des parcelles étroites. La plupart de leurs habitations à un étage et deux travées présentent les mêmes caractères : une travée mise en valeur par tous les artifices possibles précédée d’un petit porche accessible par quelques marches. Mais ils font preuve, sur ce modèle étroit, d’une imagination extraordinaire, jouent avec les lucarnes, les oriels, les décors sculptés. Ils utilisent les oppositions de matériaux en illusionnistes consommés pour créer des reliefs en trompe l’œil sur des façades plates. Ils ont aussi un sens aigu des couleurs et manient en peintre les coloris des matières qu’ils utilisent parfois uniquement pour le plaisir des yeux.»
«Le prix de revient est modique, car si les façades sur rues sont soignées, les côtés et les revers sont traités avec une pauvreté de moyens qui doit équilibrer les prix. Les frères Leseine traitent à forfait, ce qui explique aussi leur succès ».
C’est aussi le cas de l’architecte Henri Oudinot. Un numéro de L’habitation pratique en date du 7 avril 1906 illustre la variété de ses constructions. Si l’auteur s’attarde sur une «élégante villa» que l’architecte a construit à Colombes, il présente ensuite une «petite maison d’un genre tout utilitaire, et qui n’a aucune prétention au grand art, mais qui vise simplement à l’économie tout en satisfaisant à un programme de confort bien établi».
Les services de l’Inventaire général du patrimoine culturel d’Île-de-France ont ainsi répertoriés 71 signatures différentes sur les bâtiments. Cette liste non exhaustive d’entrepreneurs et d’architectes permet de prendre la mesure de la part des constructeurs locaux :19 étaient installés à Colombes, 11 dans les communes avoisinantes (Courbevoie, Bois-Colombes et Asnières) et 11 provenaient de communes plus lointaines (Levallois, Neuilly, Paris, Aulnay-sous-Bois, Viroflay, Noisy-le-Sec).