Esprit de controverse
La bibliothèque suit une méthode pédagogique en vigueur depuis le 13e siècle dans le monde universitaire: la dispute (du latin disputatio, discussion). Progressivement, la dispute a acquis une dimension critique par rapport à l'autorité en général, et au pouvoir en particulier : c'est le refus du dogmatisme, de l'arbitraire. A partir du 15e siècle, on lui trouve une alternative : la controverse, issue du vocabulaire théologique sous l'influence de l'intensité du débat religieux de l’époque.
Sous l'Ancien régime, la controverse s'exerce en premier lieu dans le domaine de la vie intellectuelle : à partir de 1757, les philosophes des Lumières et collaborateurs de l'Encyclopédie font les frais d'une cabale, appelée guerre des "Cacouacs" par leurs détracteurs. S'ensuit une série de publications dont Nouveau mémoire pour servir à l'histoire des Cacouacs de Moreau, ou les satires de Palissot : La Comédie des Philosophes, Petites lettres sur de grands philosophes. Les ripostes ne tardent : celles de l'abbé Morellet, Préface à la Comédie des Philosophes, de Voltaire, Lettres à M. Palissot, Le Café ou l'Ecossaise.
Les attaques portent aussi sur des points ou articles particuliers : les Questions diverses sur l'incrédulité de Le Franc de Pompignan ou Observations sur l'article Espagne de la nouvelle Encyclopédie de Cavanilles. Sans oublier la célèbre bataille sur l'article "Genève", avec la Lettre de J.J. Rousseau à M. d'Alembert sur son article Genève et ses ripostes : Lettre de M. d'Alembert à M. J.J. Rousseau sur l'article Genève, et Réponse de M. Marmontel à la lettre adressée par M. J.J. Rousseau à M. d'Alembert sur son article Genève.
La polémique, et les condamnations, touchent l'ensemble des oeuvres des collaborateurs de l'Encyclopédie : De l'Esprit d'Helvetius, accompagné des différentes critiques et condamnations qu'il a fait naître : arrêts des parlements, condamnation du pape Clément VIII, et de La Harpe : Réfutation du livre De l'Esprit ; le Système de la nature d'Holbach ; L'Esprit des lois de Montesquieu, avec les ouvrages critiques de Cattaneo, Pecquet ou l'abbé de La Porte ; pour ne citer qu'eux.
En marge de ce courant, le roman Bélisaire de Marmontel (1767) est condamné pour avoir prôné la tolérance religieuse ; des ouvrages polémiques suivent sa publication : Anecdote sur Bélisaire de Voltaire, Les XXXVII vérités aux XXXVII impiétés de Bélisaire par un bachelier ubiquiste de Turgot, La Censure de la Faculté de Paris de Legrand ou Réponse à l'apologie de M. Marmontel de Legge, Critique théologique du XVe chapitre de Bélisaire de Reynaud, enfin, du principal intéressé, Réponse de M. Marmontel à une lettre de M. l'Abbé Riballier.
Mémoires, factums, pièces de procès, pamphlets se font également l'écho des évènements politiques : le siège de La Rochelle, dont le Journal des choses les plus mémorables qui se sont passées au dernier siège de La Rochelle (1648) de Mervault ; le procès de Fouquet, dont : Discours au Roi par un de ses fidèles sujets sur le procès de M. Fouquet (1661) de Pellisson ; vingt pièces sur le conflit entre les princes légitimes et légitimés (1717). Il convient d'y ajouter les conspirations dans lesquelles furent impliqués le maréchal d'Ancre (1617), le comte de Chalais (1626), le duc de Montmorency (1632), le maréchal de Marillac (1632) ; mais aussi, le procès de Cinq-Mars et de Thou (1642), l'attentat de Damiens (1757) : Pièces originales et procédures du procès fait à Robert-François Damiens. Enfin, les biographies de prisonniers célèbres tel Latude avec Le Donjon de Vincennes, La Bastille et Bicêtre ou Mémoires de M. Masers de Latude (1787).
Dans le domaine judiciaire, de grandes affaires attisent les passions. Parmi les plus célèbres, l'affaire Calas, évoquée par une vingtaine de pièces, sans compter le Traité sur la tolérance (1763) de Voltaire, ou la tragédie de Chénier Jean Calas (1793) ; les affaires auxquelles fut mêlé Beaumarchais (affaire Goetzmann, 1773-1774, et affaire Kornmann, 1781-1789), avec, en marge, un curieux ouvrage sur la négociation dont Beaumarchais fut chargé par le roi pour récupérer des papiers auprès du chevalier d'Eon : Pièces relatives aux démêlés entre Mademoiselle d'Eon de Beaumont … et le sieur Caron dit de Beaumarchais (1778) ; quant à l'affaire du Collier, une quarantaine de publications la commentent.
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