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ans notre imaginaire, le vi-
trail renvoie presque immé-
diatement aux grandes ver-
rières médiévales de notre
patrimoine religieux. Pourtant, il ne se
limite pas à une époque ou un espace,
et si les réalisations des
xix
e
et
xx
e
siè-
cles sont encore peu reconnues
comme un art à part entière, elles ac-
compagnent cependant bien plus no-
tre quotidienque nous le remarquons.
Décors de magasins, cages d'escalier
des beaux immeubles, halls d'édifices
publics ou escaliers d'honneur de nos
mairies…
eugène, « Le Bâtisseur »
L'histoire commence avec Eugène
Brière (1863-1927) : nul héritage ne le
destinait particulièrement à cemétier.
C'est une rencontre fortuite qui le fit
entrer en apprentissage dans l'atelier
du peintre verrier Antoine Lusson, le
restaurateur des vitraux de la Sainte-
Chapelle de Paris.
Les Brière
une dynastie
de peintres verriers
D
Dépositaires d’un savoir-faire ancestral, les peintres
verriers Brière, installés à Levallois durant plus d'un
siècle (0674-1//3), nous invitent à l’émotion des
couleurs.
Blandine Busson
Attachée de Conservation
Archives Départementales
La coupole
Charras des
Grands Magasins
du Printemps à
Paris, ?E@>.
Formé dans cet atelier renommé, il de-
vient par la suite chargé de la direction
technique de l'atelier Néret, peintre
verrier d'Hector Guimard. Fort de l'en-
seignement de ces maîtres et familier
des demandes de la clientèle et des cir-
cuits économiques, il ouvre son pro-
pre atelier en 1896 à Levallois-Perret.
Enmême temps, en chef d'entreprise à
l'esprit avisé, il installe un « magasin
de vitraux artistiques » rue de Rome,
près de la gare Saint-Lazare, lieu parti-
culièrement stratégique. En effet, à la
clientèle aisée qui l'emprunte, il peut
ainsi présenter aisément des « pan-
neaux-échantillons » , exemples de ses
réalisations.
Grâce à ses connaissances et relations
antérieures, lorsque démarrent les
productions de son atelier de Levallois,
il a déjà acquis un fonds de dessins et
cartons pouvant servir demodèles, un
important stock de verres, de nom-
breux outils et matériaux. C'est donc
une véritable catastrophe quand un
incendie détruit son atelier de Leval-
lois quelques mois après son ouver-
ture, enmars 1897.Mais l'entreprise re-
naît de ses cendres et son activité
prend un essor considérable à une
époque de forte demande de la part
d'une clientèle essentiellement civile
et parisienne. À l’occasion des trans-
formations de la capitale, les vastes de-
meures ou appartements bourgeois
s’ornent de verrières qui viennent
éclairer et décorer pièces de réception
ou bureaux mais également escaliers
et plafonds.
À cette forte demande particulière,
s’ajoute des chantiers de grande en-
vergure : coupoles duNouveauMaga-
sin du Printemps, casino de Monte-
Carlo.
En revanche peu de vitraux religieux
sont réalisés dans l’atelier d’Eugène
Brière : ceux de l’église Saint-Leu-
Saint-Gilles de Bourg-la-Reine ou de
Saint-Justin de Levallois-Perret,
quelques chapelles funéraires.
Méthodiquement organisé, obéissant
à des règles précises et rigoureuses,
l’atelier d’Eugène Brière emploie
jusqu’à dix-huit ouvriers : peintres sur
verre, coupeurs de verre, monteurs se
répartissent les différentes étapes de
réalisation d’un vitrail. Tous n’étaient
pas attachés à l’atelier, les dessins de
maquettes et cartons à grandeur d’exé-
cution étaient souvent demandés à des
cartonniers extérieurs.
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