revueculturellen4 - page 88-89

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du département de la Seine, châteaux des environs de
Paris). La projection de plaques en couleurs l’occupe aussi :
auparavant c’estAlbert Kahn qui conviait ses invités à des
projections d’images, désormais accessibles au grand pu-
blic. L’entrée sur le site s’effectue par petits groupes et la
visite des jardins s’accompagne d’une projection de pho-
tographies.
Pour seconder Georges Chevalier, le département em-
bauche Marguerite Magné de Lalonde, professeur de
dessin, chargée de documenter les plaques autochromes.
Elle participe aux projections aux côtés de Georges Che-
valier. L’important fonds documentaire d’images estdonc
préservé, le matériel photographique conservé (mais le
matériel cinématographique de prise de vues est vendu
car le Département ne fait pas prendre de films). Quant
aux collections de journaux et le matériel d’imprimerie
(Albert Kahn éditait plusieurs publications), ils sont ven-
dus car jugés sans intérêt.
Les collections d’autochromes sont aussi exploitées hors
du site : de nombreuses projections sont organisées en
particulier à la bibliothèque historique de la ville de Paris,
rue de Sévigné et à la salle Pleyel.
1940 : mort d’Albert Kahn
Le Département laisse à Albert Kahn la jouissance de sa
maison, au 6 quai du Quatre-Septembre. Il y vit mo-
destement, en compagnie de sa gouvernante, et se pro-
mène dans « ses » jardins aux heures où ils sont fermés
au public. Âgé de 80 ans, longtemps persuadé qu’il pour-
rait reconstituer sa fortune, puis très lucide quant aux
conséquences du nazisme
2
, il meurt chez lui le 14 no-
vembre 1940. Son souhait d’être inhumé dans le jardin
ne peut pas être exaucé. Robert Renard, le secrétaire gé-
néral de la société Autour du monde fait l’acquisition
d’une concession à perpétuité au cimetière de Boulogne-
Billancourt. Lemobilier et les objets personnels d’Albert
Kahn qui n’avaient pas été saisis auparavant ne seront
vendus qu’en 1941.
1942 : les archives passent par Berlin
et Moscou !
Pendant l’occupation allemande, l’ouverture des jardins
(interdits aux Juifs à partir de 1942) est maintenue. Des
troupes occupent plusieurs bâtiments et la destinée des
meubles et objets devient chaotique notamment pour
ceux de la société Autour du monde. Certains meubles
avaient déjà été acquis par des membres de la société
mais d’autres disparaissent. Quant à la bibliothèque, un
officier allemand l’emporte
3
et on en perd la trace
4
.
Le destin des archives de l’association est plus enviable :
certes saisies, comme celles de toutes les personnalités
morales ou physiques hostiles à l’Allemagne nazie, elles
sont envoyées à Berlinpour analyse. Confisquées comme
compensation par les Soviétiques en 1945, elles sont
restituées par les Russes en 2001 et reviennent alors de
Moscou à Boulogne.
Les Archives de la Planète, quant à elles, abritées dans
leur conservatoire en retrait du quai, ne semblent pas
avoir intéressé l’occupant (onne sait pas s’il a eu connais-
sance qu’elles recelaient des documents sur l’Allemagne).
L’époux de Marguerite Magné de Lalonde, André Hur-
tret, conservateur au château de Vincennes, conseille
de dissimuler le caractère progressiste, internationaliste,
voire cosmopolite des collections en proposant des pro-
jections qui illustrent des œuvres littéraires afin de ne
pas attirer l’attention des forces d’occupation
5
. Ce qui fut
fait. Après le départ des Allemands, les bâtiments font
l’objet de réquisitions britannique et américaine.
Fin 1949, Georges Chevalier prend sa retraite ; il décè-
dera en 1967.MargueriteMagné de Lalonde devient alors
la responsable des CollectionsAlbert Kahn jusqu’en 1974.
En 1966, le Département donne le nom d’Albert Kahn à
une place du
xVIII
e
arrondissement de Paris.
1968-1986 : Une lente prise de conscience
de la valeur du site et des collections
En 1968, conséquence de la loi de 1964 de partition du
département de la Seine, la préfecture des Hauts-de-
Seine devient propriétaire des jardins et des collections.
En 1974, Marguerite Magné de Lalonde part à la retraite
et une équipe spécialisée se met en place au fil des an-
nées (laboratoire interne, documentation…)
Consécutivement aux lois de décentralisation de 1981,
c’est le conseil général des Hauts-de-Seine qui devient
le gestionnaire directdu site. En 1986, les collections Al-
bert-Kahn deviennent Musée départemental. En 1990,
une galerie d’exposition bordant les jardins est ouverte.
Un jardin japonais contemporain est créé. Plusieurs bâ-
timents sont restaurés. En 1999, des réserves, à la tem-
pérature et à l’hygrométrie contrôlées, sont aménagées
au profit desArchives de la Planète. La numérisation des
fonds estengagée. Lemusée acquiert par ses nombreuses
expositions un renom international. En 2011, plus de
120.000 visiteurs en font le musée le plus couru des
Hauts-de-Seine.
n
Albert-Kahn, musée et jardins. 10-14 rue du Port. Bou-
logne-Billancourt.
Ouvert dumardi au dimanche de 11h
à 18h y compris jours fériés. Fermé le lundi. Tarif plein :
3€, réduit : 1,50€.Tél. : 01.55.19.28.00.
Expoactuelle : «LaMongolie1912-1913 : entredeuxères».
Jusqu’ au 16 septembre 2012.
1. Témoignage de Pierre Randet, recueilli par le musée, 1987.
2. Témoignage d’Huguette Florentin, fille de Robert Renard, idem, 1995.
3. Témoignage de Pierre Randet, recueilli par le musée, 1987.
4. Le musée conserve une liste des ouvrages de cette bibliothèque.
5. Témoignage de Gérard Loubignac, fils de Mme Magné de Lalonde,
recueilli par le musée, 2004.
à sAvoiR
Dix DAtes clés
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Naissance d’Albert Kahn en Alsace
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Albert Kahn s’installe à Boulogne-sur-Seine.
Deux ans plus tard il achète son hôtel particulier
et commence l’aménagement des jardins
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Premières di cultés financières d’Albert Kahn
consécutives à la crise économique mondiale de 1929.
En 1931, il sollicite l’État pour sauver ses fondations
- &"$
Achat de la propriété de Boulogne par
le Département de la Seine
- &#
Mort à Boulogne d’Albert Kahn. Il ne verra pas
son site occupé par l’armée allemande
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Transfert au nouveau département des Hauts-
de-Seine avant la gestion directe par le conseil général
en 1981
- &&
Ouverture de la galerie d’exposition rue du Port.
La labellisation « Musée de France » avait été acquise
dès 1986
- &&&
Création de salles de stockage à température
et hygrométrie contrôlées pour les photographies
et les films
-!
Début d’importants travaux dans les jardins
nécessités par la tempête de décembre 1999
-!
Vote du conseil général pour la restructuration
du domaine, avec rénovation des bâtiments existants
et construction d’un nouveau bâtiment d’accueil
du public
Coin de jardin du
« village japonais »
avec son pavillon
de thé. Autochrome,
d’Auguste Léon, 1916.
Le jardin français
et la serre, vus
depuis le parterre
sud-est.
Autochrome
d’Auguste Léon,
juin 1915.
© Musée Albert-Kahn – Département des Hauts-de-Seine
© Musée Albert-Kahn – Département des Hauts-de-Seine
BoulogNe
Évocation
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