Vallée de la Culture n°10 - page 82

sculpture
Boulogne-Billancourt
ment duBrésil, comme celle qui devien-
dra le peintre Chégoin.
À l’instar des peintres précisément, il
chercha plus à traduire l’émotion de
l’instant – dans des petits bronzes exé-
cutés dans les deux grands fours qu’il
avait fait construire dans son jardin de
Boulogne-Billancourt – qu’il ne recher-
cha la perfection de l’achèvement.
Lorsqu’il reconstruisit sa demeure de
Boulogne, dans un style art déco, après
la Première Guerremondiale, les décors
reflétèrent bien souvent l’influence des
pays qu’il avait traversés.
au cœur de La grande guerre
Lorsqu’éclate la Première Guerre mon-
diale, c’est un sculpteur reconnu dans le
monde entier (il a hérité aussi de la noto-
riété de son père aux États-Unis) qui
décide de s’enrôler volontairement dans
un régiment de l’infanterie demarine.
Au cours de la bataille de Verdun il est
gravement blessé. Il gardera de cet enfer
des souvenirs perturbantsmais aussi des
amitiés solides dans le commandement
de l’armée française (il décorera la façade
duCercleMilitaire, place SaintAugustin
à Paris).
Peu après son rétablissement, il fut
approché pour que ses souvenirs servent
à la conception d’un monument consa-
cré aux « héros de l’armée noire ». Un
exemplaire subsiste sur une place cen-
trale de Bamako auMalimais il y a eu un
autre exemplaire à Reims. Il eut aussi
l’idée demarquer –par des bornes repré-
sentant les poilus de 14 –la ligne de front
de juillet 1918 d’où est partie la contre-
offensive victorieuse des Alliés face aux
empires centraux, qui permit l’armistice
de novembre 1918. Son idée, retenue par
le Touring Club de France, fit l’objet
d’une souscription nationale en France
et enBelgique. Plus de trois cents bornes
furent ainsi commandées. Le prototype
est toujours dans le jardinde sa demeure
de Boulogne. Il connut ensuite une
périodede travail intensedans sonatelier
de la rue Gutenberg à Boulogne, cher-
chant l’originalité et la qualité de la sculp-
ture. Ses personnages ont toujours une
expression singulière qui leur donne une
personnalité qui permet de distinguer la
« patte » de Paul Moreau-Vauthier des
réalisations de ses contemporains.
C’est appelé pour une nouvelle réalisa-
tion qu’il trouva lamort en 1936 lors d’un
banal accident de la route non loin de
Poitiers.
Sa demeure reste imprégnée de sa pré-
sence et son atelier d’artiste subsiste, là
où il réalisa tant de croquis et d’esquisses
de monuments à sculpter en France ou
dans les pays d’outre-mer. La fièvre de la
création ne l’a jamais quitté.
n
Le Faune
sculpté par
le père de Paul, toujours
présent à Boulogne
l’étain voire la céramique lorsqu’il s’as-
socie à Émile Decœur. Et les femmes et
la mode de la Belle Époque lui inspi-
reront de très nombreuses représenta-
tions, loin de l’académisme ambiant.
Sa notoriété fut consacrée par la réalisa-
tion de la sculpture symbolisant Paris et
la France placée au sommet de la porte
monumentale d’entrée de l’Exposition
Universelle de 1900. Ce fut la célèbre
sculpturede
LaParisienne
reproduitedans
tous les ouvrages sur cet événement.
Desmillions de personnes vont connaî-
tre désormais ce sculpteur hors normes,
notamment de nombreuxAméricains et
autres Anglo-Saxons. Cette notoriété
explique qu’il participa à la réunion des
artistes retenus par Pierre de Coubertin
pour promouvoir le renouveau des Jeux
Olympiques lors du congrès inaugural
de Paris en 1906.
L’émotion des voyages
À partir de 1905 et jusqu’en 1935, les
voyages occupèrent une part importante
de sa vie et de sa création. D’abord les
États-Unis puis l’EuropeduSud, l’Afrique
du Nord, et enfin l’Afrique noire. Il en
rapporta surtout des bronzes dédiés à la
corrida, aux pratiquants de l’islam, aux
hommes et femmes d’Afrique noire…
Il s’installa à Casablanca où il rencontra
les personnalités descendant des paque-
bots venant d’Amérique du Sud, notam-
La maison de
Paul Moreau-Vauthier
à Boulogne.
©CG92/Jean-LucDolmaire
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