revueculturellen4 - page 6-7

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zoom
viNgt ANS !
En janvier 1993,
Olivier Meyer décidait
de donner « droit de cité
à la danse des cités » en lui
ouvrant grand les portes
du théâtre Jean-Vilar
de Suresnes. Deux décennies
plus tard,
Suresnes cités
danse
est devenu l’un
des acteurs majeurs
de la reconnaissance
et de la maturation artistique
du hip hop.
Dès l’origine
, le festival a
organisé des confrontations
fertiles entre interprètes et
chorégraphes qui ont fait bouger les lignes,
jusqu’à faire danser sans complexes ni
tabous des hip-hopeurs sur les « Inventions »
de Bach, ou troquer les performances
frontales pour des duos d’amour.
L’affiche de la vingtième édition témoigne
avec éclat de ces moments forts, tout en
manifestant la vitalité et le renouvellement
d’une danse en plein essor.
À l’affiche
, les deux piliers du hip hop à la
française, Kader Attou et Mourad Mourzaki,
directeurs de centres chorégraphiques
nationaux et qui ont fait leurs débuts sur
une scène de théâtre à Suresnes, des figures
internationales de la danse contemporaine
tels qu’ Angelin Preljocaj et Robyn Orlin,
le créateur José Montalvo dont la danse
métissée, inaugurée il y a 18 ans à Suresnes,
a fait le tour du monde, des chorégraphes
talentueux de tous styles - Sylvain Groud,
Sébastien Lefrançois, Blanca Li, Laura Scozzi,
Pierre Rigal, Abou Lagraa, Farid Berki,
Monica Casadei, Jérémie Belingard - mais
aussi de jeunes pousses : John Degois, Céline
Lefèvre, Amala Dianor, Sandra Sainte-Rose,
Mehdi Ouachek, Simhamed Benhalima...
Les best of
du festival alterneront avec
les créations, avant un final triomphant
assuré par les deux compagnies françaises
championnes du monde de hip hop,
les Pokemon Crew et les Wanted Posse.
Fidélité, création et ouverture : la recette
concoctée il y a deux décennies par Olivier
Meyer n’a pas pris une ride !
I.C.
Réservations : du mardi au samedi de 13h à 19h
au 01.46.97.98.10.
ou sur
Théâtre de Suresnes Jean-Vilar.
16 place Stalingrad - 92150 Suresnes
bio
ANgeliN pReljocAj
Né en région parisienne de parents albanais, Angelin
Preljocaj a suivi une formation classique puis
contemporaine, notamment auprès de l’Américain Merce
Cunningham. Après avoir été interprète dans
la compagnie de Dominique Bagouet, il fait ses débuts de
chorégraphe en 1984. Primé au concours de Bagnolet, il
fonde sa propre compagnie et trace depuis son chemin de
créateur talentueux et reconnu, à mi-chemin entre
stylisation esthétique et vérité émotionnelle. Ses ballets
couvrent tout l’éventail de la création chorégraphique,
depuis le très intime duo d’« Annonciation », la relecture de
classiques tels que « Noces » (1989) et « Le Sacre du
printemps » (2001), jusqu’aux grandes pièces d’ensemble
comme « Le Parc » créé en 1994 pour le Ballet de l’Opéra de
Paris, « Blanche-Neige » en 2008 ou « Suivront mille ans
de calme » (2010), en collaboration avec les danseurs
du Bolchoï. I.C.
avoir participé à une ou plusieurs éditions du festival, de
se présenter à l’audition. Une soixantaine sont venus.
Outre leur danse, j’ai voulu connaître aussi leur person-
nalité. J’ai fait passer à chacun d’eux un entretien en leur
demandant de se raconter, de dire pourquoi ils dansaient
et ce qu’ils aimaient dans le hip hop. Parallèlement, a
mûri l’idée de composer une pièce 100% féminine, à re-
bours de l’image traditionnelle d’un hip hop masculin.
Quatre filles se sont vite distinguées. Leur forte per-
sonnalité, leur capacité à venir vers moi et à se prêter à
l’échange, leur aptitude à comprendre instinctivement
ou intellectuellement ma danse ont fait la différence.
Elles avaient aussi en commun un certain niveau tech-
nique qui les mettait à l’aise avec ma gestuelle.
Vous êtes-vous inspiré de leur danse ou leur avez-vous
apporté votre propre univers ?
Je leur ai proposé l’essentiel du corpus chorégraphique,
mais ilm’estarrivé de leur emprunter unmouvement ou
une attitude. En général, durant le processus d’élabora-
tion qui a duré plusieurs semaines, les journées se ré-
partissaient en deux temps. Lamatinée était consacrée à
réunir ce que j’appelle unmatériel chorégraphique, c’est-
à-dire un ensemble de positions et d’enchaînements que
je cherchais et que je leur transmettais. Cette grammaire
SuResNes
Danse
© Dan Aucante
© Dan Aucante
© PMilville-CGeney-AJouanjan.
gestuelle a servi de syntaxe. Nous l’avons ensuite réarti-
culée pour l’utiliser selon les besoins. L’après-midi était
plutôt consacrée à un travail de recherche. Nous avons
notamment expérimenté des situations à partir d’un
tableau ou d’un texte - « Le Déjeuner sur l’herbe » de
Manet, un poème érotique de Baudelaire…
Comment les danseuses ont-elles réagi ?
Cette façon de procéder était pour elles assez nouvelle
et cela n’a pas été forcément facile. Mais elles compren-
nent très vite et se sont accroché. Elles se sont montrées
volontaristes, investies. Je ne leur ai pas donné beaucoup
d’explications sur la pièce, qui s’est construite et écrite
au fur et à mesure que nous travaillions ensemble. Elles
ont réussi à travailler dans l’abstraction, tout en gardant
leur énergie.
Que représente pour vous cette collaboration ?
Pour moi, il s’agit d’abord d’une rencontre. Il n’était pas
questionde les utiliser ou de les plier de force àmonuni-
vers, mais d’instaurer un véritable échange. J’espère que
cette création sera à la fois nouvelle et satisfaisante et sur-
tout, qu’elle leur apportera quelque chose. J’aime procé-
der par contamination réciproque, et non par simple
décalque des procédés. J’attends de mes interprètes
qu’elles suent sur mon travail, qu’elles butent dessus et
que, à mon tour, je sois dérangé par leurs propositions
ou leurs improvisations. C’estainsi que le chemin fait en-
semble devient intéressant. Une chose est sûre, mes
craintes initiales quant à la récupération du hip hop par
les contemporains se sont effacées. J’ai le sentiment de
travailler non avec des hip hopeuses, mais tout simple-
ment avec des danseuses.
n
Propos recueillis par Isabelle Calabre.
La création d’Angelin Preljocaj à quatre danseuses,
CaroleDauvilliers, JannGallois, MarionMotin et Émi-
lie Sudre, sera donnée les 20, 21, 22 et 24 janvier 2012
avec aussi à l’affiche ces mêmes jours une choré-
graphie de Robyn Orlin.
© Dan Aucante
Angelin Preljocaj
et “ses“ danseuses
lors d’une
répétition dans
le cadre du festival
Suresnes cités
danse
2012.
Théâtre de
Suresnes Jean-
Vilar.
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