un homme, un lieu
Neuilly
Il y a quatre-vingt ans, au large de l’Islande, le grand explorateur terminait sa
course à bord de son dernier « Pourquoi pas ? », un nom qui résonnait comme
une devise pour sa vie. Il était né à Neuilly soixante-neuf ans plus tôt..
ean-BaptisteCharcot naît le 15 juillet
1867 dans la maison du 29 rue
Saint-James, aujourd’hui 53 bd du
Commandant-Charcot.) à Neuilly
que son père, le célèbre neurologue
Jean-Martin Charcot, a louée pour que
le nourrisson soit à portée des vaches.
Neuilly est encore la campagne ; son
grand-père maternel, Vincent-Claude
Laurent-Richard, riche amateur d’art et
collectionneur, habite le village. Il offrira
lamaison à sa fille et à son gendre. Après
leur décès, Jean-Baptiste la rachètera et
en fera son port d’attache.
une passion précoce pour
l’aventure
Aussi loin qu’il s’en souvienne, le jeune
Charcot veut naviguer ; son père s’y
oppose, ou plutôt subordonne sa passion
de la mer à ses études médicales. Il sera
donc médecin, interne de son père à la
Salpêtrière, un père pour qui il éprouve
une admiration jamais démentie, et ce
n’est qu’à lamort de celui-ci, en 1893, qu’il
se permettra de resonger à lamer et aux
navires. Parmi ses canulars d’étudiant, on
rapporte une mystification qu’il avait
inventée pour mettre les habitants de
Neuilly en émoi : sur le lac Saint-James,
il était parti faire du canotage avec une
élégante jeune femme. Au milieu du
lac, une querelle s’élève entre eux, les
badauds s’arrêtent, commencent à se
grouper sur la rive, et tout à coupCharcot
jette à l’eau sa passagère. Émoi de la
foule, arrivée de la police qui arrête
Charcot –lequel éclate de rire en retirant
du lac sa victime, unmannequin d’osier.
On raconte aussi que, beaucoup plus tôt,
le petit garçon prenait très au sérieux le
costume marin qu’on lui faisait porter,
comme c’était la mode enfantine ; et à
ceux qui lui demandait s’il voulait être
marin il répondait : « Pourquoi pas ? »
«
Pourquoi pa ?
(sic) », c’est ainsi qu’il
baptise son premier navire, une caisse à
savons munie d’un mât et d’un torchon
pour voile, qui fait naufrage aumilieu du
bassin du jardin de son grand-père, 19
avenue deMadrid àNeuilly. « Pourquoi
pas ? », cesmots s’imposent à lui comme
une devise :
« Ce sont les deux mots que
j’écrivais étant tout enfant au bas d’extraor-
dinaires, d’irréalisables projets de navires
destinés à découvrir le pôle Nord qui
ornaient mes livres de classe et m’attiraient
de terribles pensums »
.
En 1892, son père lui offre son premier
bateau, de neuf tonneaux, le
Courlis
qu’il
revend l’année suivante, pour faire
construire le premier de ses
Pourquoi
pas ?
Il y en aura quatre ; le quatrième
sera son tombeau.
charcot
ou la légende des Pôles
©AgenceBridgeman
Par Philippe Barthelet
J
Jean-Baptiste Charcot sur la
passerelle du
Pourquoi Pas
IV
en flek-flfe lors de sa
deuxième expédition en
Antarctique. Il disparaitra
dans le naufrage de son
bateau au large de l’Islande
le fj septembre flhj.