Comment définir l’académieque vous fondez àLaSeine
musicale ?
Comme une structure pour faire découvrir et enseigner
la musique, en premier lieu à des enfants. Le mot acadé-
mie contient l’idée de souplesse, un peu à l’américaine :
un lieu très ouvert où tout est possible, des cours privés
pour les enfants à des actions plus larges dans les écoles,
les collèges.
Pourquoi vous êtes-vous lancé dans ce projet ?
Mon parcours personnel y est pour beaucoup. Je ne suis
pas né dans une famille de musiciens, je suis issu de
la classe moyenne de banlieue, à Sartrouville dans les
Yvelines. Si je n’avais pas eu un professeur de collège
remarquable, qui au lieu de nous faire jouer de la flûte à
bec nous faisait écouter de lamusique et écrire des chan-
sons, je n’aurais peut-être jamais fait de musique de ma
vie ! Ilm’a repéré, il a conseilléàmes parentsdem’inscrire
dans un conservatoire et j’ai été aussitôt fasciné. J’avais
11 ans, j’ai commencé le violon, or si vous voulez devenir
un excellent instrumentiste, il vaut mieux commencer
plus tôt. Lorsque j’ai eu la chance de découvrir ma voix
de contre-ténor à 17 ou 18 ans, j’avais enfin trouvé un
domaine où je n’étais pas trop vieux ! Après dix-huit ans
de carrière, j’éprouve le besoin de redonner ce qui m’a
été donné quand j’étais jeune. Quand on n’est pas d’un
milieumusical, il est difficile d’inciter un enfant de 6 ou 7
ans à commencer un instrument. Il y a donc une foule de
talents qui se perdent. Il existe beaucoupde programmes
éducatifs autour du sport, mais les mêmes qualités
peuvent êtredéveloppées par lapratiqued’un instrument
de musique, et c’est très précieux pour un enfant, même
s’il ne devient pasmusicien plus tard.
À qui s’adresse cette académie ?
Aux enfants avant le conservatoire et aux jeunes adultes
après. Par le relaisdes écoles, des associations, nous allons
repérer de « jeunes apprentis », entre 7 et 10 ans, dans
desmilieux qui n’ont pas accès à lamusique classique. La
mixité sociale y est réduite et, effectivement, apprendre
un instrument de manière sérieuse et soutenue coûte
de l’argent. Nous proposerons donc un enseignement
entièrement gratuit, avecprêtd’instrument, sur plusieurs
années. En priorité, pour des enfants du département,
repérés dans les ZEP par exemple. On a aussi prévu d’in-
clure sur ce programme quelques enfants de réfugiés,
qui avaient commencé la musique chez eux et n’ont plus
depuis la possibilité de le faire. Trois classes instrumen-
Icône du chant baroque au concert comme à l’opéra,
le contre-ténor implante son académie pépinière de talents au
sein de La Seine musicale. Entretien avec un artiste pédagogue
qui éprouve à 38 ans le besoin d’offrir aux plus jeunes
ce qu’il a lui-même reçu.
PHILIPPE JAROUSSKY
LE PROJET D’UNE VIE »
« UNE ACADÉMIE
CONÇUE COMME
BOUlogne-
billancourt
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