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PaRis
ARTÈRE VITALE, 1914
C
ette perspective sur la Seine, prise un dimanche de
l’été 1914 depuis le pont de la Concorde, évoque
simultanément la mémoire de trois Expositions
universelles successives ; le rôle industriel et commercial de
cette artère vitale, et les loisirs des Parisiens.
Au loin, la silhouette du premier palais du Trocadéro,
construit à l’occasion de l’Exposition de 1878, domine la
colline de Chaillot. Le préfixe « néo » semble particuliè-
rement approprié à ceparangonde l’éclectisme architectural,
à la fois néo-mauresque, néo-byzantin, néo-indien… La
performance deGustave Eiffel fut le clou de l’Expositionde
1889 ; pour celle de 1900, le pont Alexandre III constituait
une entréegrandiose. Sa valeur technique (sonarcheunique)
et esthétique (son programme décoratif ) en ont fait un
monument du paysage urbain.
Le fleuve est remonté par un remorqueur et son train de
péniches, probablement depuis LeHavre ouRouen. De ces
avant-ports de la Basse-Seine, arrivaient à Paris les houilles
d’Angleterre, le vind’Algérie, l’avoine de laBaltique, les bois
du Nord… chargés sur des péniches de 500 à 700 tonnes,
parfois même sur des chalands de mer d’un millier de
tonnes. Rive gauche, des péniches ont amarré au port des
Invalides devant des pondéreux comme la houille, le sable,
la pierre meulière –masses noires et dorées qui s’étalaient
sur l’ensembledes berges. Rivedroite, les appontements des
bateaux omnibus égayent de leurs réclames colorées le port
des Champs-Élysées, aménagé pour l’Exposition de 1900.
De Charenton à Suresnes, ces vapeurs répondaient parfai-
tement au besoinde transport des Parisiens qui disposaient
au longduparcours de cent pontons. Le dimanche, l’hippo-
drome de Longchamp était ainsi facilement accessible.
L’autochrome témoigne d’une période de transition pour
le trafic fluvial et l’activité portuaire. Les transports terrestres
et lemétropolitainconcurrencent de plus enplus les bateaux
omnibus, qui cesseront leur activité en 1934. Le port des
Champs-Élysées deviendra un port de plaisance pour les
yachts de passage, puis pour les bateaux-mouches. Celui des
Invalides sera supprimé en 1930. Depuis la crue de 1910, une
transformationdes berges de la Seinedans le centredeParis
est en effet engagée. À la veille de la Seconde Guerre
mondiale, on ne verra plus, sur une distance de 5 km, le
débarquement et le dépôt des pondéreux et des denrées
multiples. Les débardeurs laissent la place aux pêcheurs qui
taquinent le goujon en songeant, peut-être, que Paris estné
de la Seine.
S
OPHIE
C
OUëTOUx
Musée Albert-Kahn
ALBERT-KAHN
Chronique de l’œil
La Seine depuis le pont de
la Concorde, vue vers l’aval.
Autochrome de Stéphane
Passet, 19 juillet 1914.
Précision :
Sur les 72 000
autochromes
du musée
Albert-Kahn,
environ 5 000
présentent des
vues de Paris.
© Musée Albert-Kahn - Département des Hauts-de-Seine
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