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ntre le sanctuaire royal de Saint-
Denis, au nord, et bientôt le château deVersailles, au sud,
cette langue de terre s’offrait à l’évidence comme
la plus hospitalière qui fût aux abords de la capitale. Les
dangers de la guerre de cent ans évanouis, les marches
de Paris avaient en effet retrouvé leur sérénité première
tandis que la ville, à l’inverse, pressée par l’émancipation
de la grande bourgeoisiemarchande, était appelée à de-
venir le théâtre des heures les plus convulsives de l’his-
toire de France. aussi apprit-on vite à se méfier des
humeurs de la capitale
.
il faut ici considérer que la ville s’arrêtait, à l’ouest, avec
la porte Saint-Honoré qui desservait la rue dumêmenom
à hauteur de l’actuelle rue royale. au-delà s’étendait une
campagne verdoyante parsemée de petits villages nom-
més Le roule, chaillot, auteuil ou Passy…Dès la fin du
xVii
e
siècle la mode se répandit de faire construire des
hôtels particuliers hors de l’enceinte de la ville. mais au
milieu du
xViii
e
siècle, cela ne menait pas au-delà de
l’hôtel d’Évreux, actuel palais de l’Élysée…
Dans un tel contexte, les hauteurs ourlant la première
boucle de la Seine présentaient tous les avantages : vé-
ritable campagne couronnée de forêts giboyeuses, elles
s’élevaient à une distance idéale de la ville, suffisante pour
échapper aisément, si besoin était, à tout débordement
d’humeur, mais point trop grande non plus, pour qu’il
restât facile de s’approvisionner en denrées rares, par
route ou par voie d’eau, de fréquenter les salons ou
d’aller au théâtre.
Une campagne mirifique
en bonne logique historique, il revint à François i
er
de
poser le premier geste décisif et, comme il le faisait
depuis 1516 à chambord, le roi fit élever dans la plaine
alluviale de Boulogne un château de plaisance où il
aimait à se rendre. Son absence de la cour rappelait alors
sa captivité enespagne, raisonpour laquelleonsurnomma
l’édifice le « château demadrid ». conçue par le florentin
Girolamo della robbia, la résidence royale était abon-
damment ornée d’un décor de céramique qui lui valut
encore la belle appellationde « châteaude faïence ».mais
sans doute l’influence renaissante italienne y était-elle
justement tropmarquée car le château fut bientôt délaissé,
transformé en fabriquedebas de soie sous LouisxiV, puis
démoli à la fin du
xViii
e
siècle. François i
er
fut encore à
l’origine du premier château demeudon, offert peu au-
paravant à sa maîtresse, anne de Pisseleu, par antoine
Sanguin. Devenu propriété des Guise en 1552, meudon
fut embelli selon le goût du temps et confié aux bons
soins de Primatice. ainsi Boulogne et meudon, à eux
seuls, eussent justifié la comparaison des châteaux de la
Seine avec ceux de la Loire.
au
xVii
e
siècle, meudon appartint à abel Servien, surin-
tendant des Finances, qui en confia le remaniement à
Louis LeVau. Le fils de Servien se dessaisit de ce domaine
auprofit de Louvois qui trouva bond’y intégrer le château
de chaville, propriété familiale voisine, et d’en faire tracer
les jardins par Le nôtre. L’œuvre conjugué du grand
architecte et du plus fameux jardinier ne pouvait qu’at-
tirer la convoitise du Grand Dauphin, fils de Louis xiV,
qui obtint de la veuve de Louvois d’échanger meudon
contre son château de choisy. La proximité deVersailles,
où la cour s’était installée en 1682, jouait à plein dans ce
choix, comme dans beaucoup d’autres de même nature
jusqu’à la chute de la monarchie.
Philippe d’orléans avait en cela devancé son frère en
achetant le château de Saint-cloud dès 1658, aumoment
où le roi Soleil concevait à peine le projet d’agrandir le
relaisdechassede leurpère.maisonrelativementmodeste
à l’origine, Saint-cloud avait été offert par catherine de
médicis auxGondi qui l’agrandirent dès la findu
xVi
e
siècle
puis le vendirent, en 1655, au banquier Barthélemy
Hervart. monsieur l’acquit de ce dernier et confia à
© Archives départementales des Hauts-de-Seine
D
ominique
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rême
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irecteur Du
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ceaux
FLamboyants
destins
Dessin de la décoration
et du feu d’artifice tiré
à Meudon à l’occasion
de l’anniversaire
de la naissance
de Monseigneur le duc
de Bourgogne le
=? septembre =B@A.
Morel et Gobin.
les châteaux
de la seine
Dossier
Voyage dans les paysages
du Pouvoir. de leur âge d’or
à l’anéantissement final.