

issy-les-
moulineaux
Patrimoine
séminaire
À la lisière du vieux village d’Issy, le château de la
Reine Margot est devenu au XVII
e
siècle la « maison
de campagne » des Sulpiciens, cette très particulière
et efficace compagnie de directeurs de conscience
qui ont formé (et forment) une bonne partie des
curés de France puis d’ailleurs. Une histoire où, de
Jean-Jacques Olier à Fénelon ou Ernest Renan, les
grands esprits ne manquent pas
.
c
’est le domaine des
« hommes
d’une piété grave et raisonnable »,
issus des grands tour-
ments spirituels du XVII
e
siècle : Olier, Bretonvilliers,
Tronson.Trois fils de bonne famille parisienne qui se font
prêtres et se retrouvent d’abord bien mal à l’aise dans la
très baroque Église catholique de leur temps.
Jean-JacquesOlier est le fondateur : après avoir parcouru
le royaume et traverséune profondedépression, il conclut
qu’il faut mieux former les prêtres et crée en 1642 un
séminairedans sa paroissede Saint-Sulpice et une« com-
pagnie » vouée à la direction spirituelle des séminaristes.
Alexandre de Bretonvilliers est le facilitateur : il prend le
relais d’Olier comme curé de Saint-Sulpice en 1652 et
quand il voit combien celui-ci apprécie ses séjours dans
la « maison » d’Issy de son ami M. de Sève, il l’achète à
celui-ci en 1655. C’est donc là qu’en 1657, Olier
« fut terrassé
par le mal qui le minait, et c’est d’ici qu’on le transporta en
toute hâte au séminaire Saint-Sulpice, où il devait mourir
huit jours après, assisté par saintVincent de Paul. »
Breton-
villiers prend alors la tête de la Compagnie.
Jean-Jacques Olier
disait avoir fondé
les sulpiciens
pour que
« ce qu’il
a plu à Dieu de me
faire connaître de
sa vérité »
soit
répandu
« dedans
le cœur de tout
le monde, et
surtout de ceux
qui doivent
enseigner »
.
Louis Tronson est l’orga-
nisateur : neveu de M. de Sève, il
prend en main le séminaire à la mort
d’Olier puis la Compagnie à la mort de
Bretonvilliers en 1676. Du domaine d’Issy que
celui-ci a légué aux sulpiciens, il fait lamaison de
campagne des séminaristes. À partir des enseigne-
ments d’Olier, il pose aussi les fondements de la
« solide
doctrine »
sulpicienne qui fournira à l’Église de France
« ce clergé d’une physionomie si particulière, le plus discipliné,
le plus régulier, le plus national, même le plus instruit »
. Sa
réputation est telle que malgré sa maladie qui le force à
garder la chambre, il est l’un des trois arbitres de la vive
querelle du quiétisme qui agite la Cour et les milieux
catholiques dans les années 1690.
L’étincelle de la querelle est M
me
Guyon, une mystique
dont les volubiles épanchements sur l’anéantissement
devant Dieu ne sont pas toujours strictement en accord
avec la théologie catholique du temps. Face à elle, les
attitudes vont se cristalliser autour des deux meilleures
plumes du milieu, Bossuet et Fénelon. Bossuet se méfie
de lamystique. Fénelon, pas plusmystiquemais attiré par
ce qui lui manque et soucieux d’élaborer une théologie
de
« l’amour désintéressé »
, souhaite qu’on trouve des
accommodements avecM
me
Guyon. Qui demande l’arbi-
tragedeTronson, Bossuet etNoailles, l’évêquedeChâlons.
Tronson ne pouvant se déplacer, Bossuet et Noailles
passent de nombreuses journées chez lui à Issy à partir
de l’été 1694 pour rédiger trente « articles » définissant
la doctrine. Articles qu’ils présentent à Fénelon en mars
1695.
« Le lendemain,
raconte Fénelon
, je déclarai par une
lettre (...) que je les signerais par déférence contre ma
Issy, 1695 :
Bossuet,
Noailles
et Tronson
présentent à
Fénelon (réticent)
leur texte contre
les excès du
mysticisme.
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illustre
Le domaine de la compagnie de Saint-Sulpice en >CA=