Vallée de la Culture n°10 - page 113

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beLvédères
bon air, bel air
Dans son beau texte sur Manhattan, « L’invention du quotidien » (in
Arts de faire
, 1990Gallimard), Michel de Certeaumontrait
que la regarder depuis les tours du World Trade Center, c’était être enlevé à l’emprise de la ville, la mettre à distance, la
survoler, embrasser sa totalité et sa complexité d’un seul coup d’œil.
Il faut être attentifs à ces pratiques touristiques ou dominicales, qui nous poussent aussi bien à monter aujourd’hui sur la
plateforme sommitale de l’Empire State Building, que sur la grande roue de Londres (très justement dénommée London
Eye), en haut des escaliers du Sacré Cœur … ou sur les terrasses de Suresnes, de Saint-Cloud, de Meudon ou du parc Henri
Sellier au Plessis-Robinson.
Bien plus que l’indice d’un sentiment de velléité propriétaire, ces rites réguliers sont lamarque, depuis la révolution industrielle
et l’extension incontrôlée des grandes villes, d’une angoisse devant un étalement qui semble infini, angoisse qui ne demande
qu’à s’apaiser.
À l’heure où les débats sur lamétropole parisienne font principalement état de discussions sur ses délégations de fonctions,
il conviendrait aussi de s’interroger sur les représentations qui circulent chez l’homme de la rue, quant à ses paysages, ses
grandes compositions, ses points de repère, bref sa capacité à devenir habitable.
Vue depuis le belvédère du parc du Domaine de Saint-Cloud. À droite l’ancien siège du groupe Thomson à Boulogne. Au fond, La Défense.
Photo : Jean-Luc Dolmaire
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