Pour lui, la rénovation des deuxmaisons importées
du Japon et installées vers 1900 s’imposait. «
Ce
type d’édifices est généralement rénové tous
les 100 ans
» explique l’archéologue, spécialiste
de l’histoire de l’architecture japonaise et maître
de conférences en histoire de l’art et archéologie
de l’Extrême-Orient à l’université Paris-Sorbonne.
Enquête préliminaire
Jean-Sébastien Cluzel commence à étudier les
maisons japonaises d’Albert Kahn en 2005 dans
maisons jusqu’à aujourd’hui. L’idée est de
retrouver l’état d’origine à partir de l’état actuel
des pavillons et de reconstituer l’histoire des
différentes restaurations.
»Ses recherches ont un
impact sur les travaux : «
Il ne s’agit pas de refaire
ces maisons comme elles étaient au Japon. Nous
cherchons à nous rapprocher au plus près de leur
état au temps d’Albert Kahn, lorsqu’elles ont été
installées sur le site.
» Quelques exemples ?
«
Le bâtiment situé le plus à l’ouest va retrouver
son toit en chaume et le second, beige avant
les travaux, reprendra sa couleur d’origine, un bleu
assez intense, presque indigo.
» Pour combler
le manque d’information sur l’état d’origine de
l’intérieur, les chercheurs réalisent des micro-
prélèvements sur les murs en plâtre pour reconsti-
tuer les pigments et définir la teinte exacte. «
De
cette manière nous connaissons les différentes
couches de peinture. Des études, menées égale-
ment pour l’extérieur, qui montrent comment le
pavillon ouest est passé du bleu au jaune puis au
marron. Ces découvertes confirment la véracité
des couleurs des autochromes.
» Ces anciennes
photographies permettent également d’identifier
les essences d’origine des bois par la forme des
poteaux ou des piliers remplacés depuis.
L’archéologie du bâti
La plus grande partie des recherches se dé-
roule pendant le chantier : «
Ici, les archéologues
vont faire parler le bâtiment au cours de son
albert-kahn.hauts-de-seine.fr
focus
8
Albert-Kahn, musée et jardin départementaux
port duHavre et qu’elles ont été commandées par
Albert Kahn. Le remontage a été réalisé sur place
par des Japonais, comme l’indique le système de
numérotation sur les poutres et les poteaux de la
charpente. Pendant la période d’Edo les mesures
utilisées par les charpentiers étaient différentes
entre l’Ouest et l’Est du Japon, nous avons ainsi
pu localiser l’origine géographique des fabriques
dans la région du Kanto.
»
Faire parler les images
Jean-Sébastien Cluzel et son équipe poursuivent
ce travail en vue du chantier de restauration.
«
Nous avons étudié les autochromes* et pho-
tographies, des premières prises de vues des
« On part de l’édifice
pour refaire une histoire »
La rénovation desmaisons du jardin japonais traditionnel d’Albert Kahn se poursuit.
Jean-Sébastien Cluzel, archéologue en charge du projet, évoque les recherches
menées sur ces fabriques étonnantes.
le cadre d’un accord scientifique avec le musée.
Son premier rapport rendu l’année suivante
évalue la valeur patrimoniale de l’ensemble et
confirme plusieurs hypothèses : «
Je me suis
rendu sur place avec des collègues japonais. En
observant ces pavillons et en les mesurant, nous
avons tout de suite vu qu’il ne s’agissait pas de
maisons complètes mais de petites parties de
grandes demeures japonaises. Des marques de
tampons à l’encre noire sur les charpentes nous
ont appris que ces fabriques sont passées par le
Jardin japonais - maison. Propriété d’Albert Kahn, Boulogne,
France, 14 mai 1915. Autochrome d’Auguste Léon
© Département des Hauts-de-Seine, Musée départemental Albert-Kahn, collection Archives de la Planète
ànoter
La rénovation desmaisons implique la
fermeture du jardin japonais traditionnel.
Pendant le chantier, une tentevitrée installée
dans laprairiedu jardinanglais tout proche
permet auxvisiteurs de suivre le travail
minutieux des artisans japonais et français.