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aCTIOn CULTURELLE

Hauts-de-Seine

e XIX

e

siècle est-il le siècle des

correspondances ? C’est la ques-

tion posée en 1995 par J.-L. Diaz

dans la revue

Romantisme

. Le fait

est que les nombreux travaux de publica-

tion entrepris dès la fin des années 1880

semblentabonderdans ce sens.Toutefois,

il faut attendre les années 1930-1940pour

voir les premières éditions sérieuses,

dotées d’appareils critiques de qualité.

Selon certains, l’étape de la publication

confère à la correspondance le statut de

« littérature épistolaire»,mutationd’im-

portance pour un vecteur de communi-

cation trop souventconsidéré sous le seul

angle du document biographique.

« Qu’est-ce qu’une lettre sinon quelques

mouvements d’une âme, quelques instants

d’une vie, saisis par le sujetmême et fixés sur

le papier ? »

estimeG. Lanson, qui ajoute :

« Il n’y a pas d’art épistolaire ; il n’y a pas de

genre épistolaire, dumoins dans le sens litté-

raire dumot genre. La forme épistolaire n’est

pas une forme esthétique, choisie à dessein ;

c’est la nécessité matérielle et brute qui l’im-

pose. On écrit ce qu’on ne peut pas dire, et

voilà tout »

.

Une explicationà l’intérêt précocepour la

correspondance du XIX

e

siècle, est, sans

doute, à trouver du côté des recherches

scientifiques contemporaines touchant

auxmécanismes du psychisme (Charcot,

puis Freud), qui vont servir de base à la

psychanalyse. La correspondance est dès

lors considérée comme cette littérature

inconsciente, qui par làmêmepossèderait

seule la saveur du vrai, du spontané, du

naturel. Diaz, plus pragmatiquement,

impute le phénomène à

« l’industrialisa-

tion de la librairie, qui, profitant de l’intérêt

voyeuriste du public pour la vie privée,multi-

plie les éditions de correspondances »

. Les

deux thèses ne sont pas sans rapport (ni

sans écho auXXI

e

siècle).

En fait, un élément très concret a décidé

du champ temporel duprojet éditorial de

la direction des Archives des Hauts-de-

Seine : le souhait d’utiliser l’exceptionnel

fonds de littérature du XIX

e

siècle de la

bibliothèque André-Desguine (cette

richesse n’avait pas échappé aux acteurs

de la procédure de donation de la biblio-

thèque en 1983). Le cadre chronologique

posé, il sembla plus éloquent d’aborder la

création littéraire, non par le produit

achevé (l’œuvre), mais, par les prémices :

intentions abouties ou avortées, hésita-

tions, conseils donnés ou reçus, échecs.

Pour cela, nous disposions d’un autre

précieux fonds : « les entrées par voie

extraordinaire », selon la terminologie

archivistique. L’extraordinaire réside ici

dans le fait que les documents intégrés à

cette sériene sontpas issusdeversements

relevantdesmissions légales des archives

départementales (voieordinaire). Ce sont

généralement des pièces isolées, venues

enrichir les collections soit de manière

non onéreuse (don, legs, dépôt), soit, au

contraire, par achat auprès de libraires ou

en vente publique.

une causerie « à bâtons rompus »

Après la personnalité de l’épistolier-

auteur, le choix des lettres a donc été

guidé par l’intérêt du contenu au regard

du processus de création de celui-ci, ses

préoccupations éditoriales, son réseau

amico-professionnel. Cependant, nous

avons aussi souhaité introduire une

dimension plus légère, afin de ne pas

figer nos héros dans une posture acadé-

mique,mais de lesmontrer enprise avec

le quotidien. On en revient, alors, à la

lettre source biographique, mais aussi

substitut de l’oralité, quand celle-ci ne

peut pas s’exercer, cequi est, après tout, sa

fonctionpremière.Dans cetteperspective,

la correspondance s’apparente étroite-

ment à une autre forme d’échange, cette

activité intrinsèquement sociale qu’est la

conversation. La difficulté fut alors de

sélectionner tellemissive, d’éliminer telle

autre, le postulat étant de proposer un

florilège de correspondants (de Balzac

à Verlaine) et une causerie « à bâtons

rompus ».

correspondances

Florilège d’auteurs, de Balzac à Verlaine,

À Bâtons rompus ; fragments

de correspondances littéraires du XIX

e

siècle

a puisé dans les fonds,

si riches et divers, des Archives des Hauts-de-Seine. Petite histoire

d’un projet éditorial par son auteur.

L

Robert de

Montesquiou- Fezensac

Lettre à Judith Gautier,

20 juin 1908

2 pages. 27,6 x 21,1 cm.

Lettre inédite.

©CD92/Arch.dép.Hauts-de-Seine/V.Lefebvre