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Domaine départemental de la Vallée-aux-Loups
Domaine départemental de la Vallée-aux-Loups
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est à Saint-Malo, son modello à la Vallée-aux-
Loups. Unmodello est un avant-projet très abouti
présenté au commanditaire avant l’exécution du
portrait final. C’est le cas de cette huile sur toile
selon plusieurs spécialistes du peintre dont Sidonie
Lemeux-Fraitot. Pour elle, le doute n’est pas
permis pour plusieurs raisons : «
La finesse de la
peinture pour commencer, en particulier auniveau
de la tête. On reconnait parfaitement le modèle
sur ce tableau de petite taille. Ce tableau n’est
pas totalement abouti pour Girodet, on voit encore
les coups de pinceaux, mais tout est déjà en
place, très bien peint, fait pour être accepté par le
modèle. Il existe d’autres modelli de Girodet, celui
du portrait de madame de Prony notamment, qui
présentent le même caractère ‘‘d’inachèvement
achevé’’ et qui ont le même format.
»
L’œuvre retrouve sa place
Ce tableau est d’autant plus exceptionnel que son
rôle d’esquisse ne le destinait pas à être conservé.
On connaît l’histoire de l’original remis à
Chateaubriand, placé dans la chambre de son
épouse, puis déposé chez Juliette Récamier avant
d’être légué au musée de Saint-Malo selon la
volonté de l’écrivain. Mais aucune trace du modello.
«
Nous savons seulement qu’il ne figure pas dans
la vente après décès de Girodet dans laquelle est
mentionnée une ébauche peinte dont la compo-
sition est proche du dessin préparatoire conservé.
Parfois le modèle gardait son modello, compris
dans le prix du portrait.
»
Sources d’inspiration, goûts, esthétique, po-
litique… Chateaubriand l’écrivain et Girodet le
peintre ont beaucoup en commun. Ami et admi-
rateur du talent du peintre, Chateaubriand fait à
plusieurs reprises son éloge. Avec les
Funérailles
d’Atala
(1808), ce portrait est l’œuvre majeure de
Girodet. Il devient rapidement la représentation la
plus fameuse de l’écrivain qui y fait allusion dans
ses
Mémoires d’outre-tombe
: « Girodet avait mis
la dernièremain àmon portrait. Il le fit noir comme
j’étais alors ; mais il le remplit de son génie. »
Affinités électives
«
Si ce tableau est aussi connu, c’est grâce à
Chateaubriand lui-même
, explique Sidonie
Lemeux-Fraitot, docteur en histoire de l’art et
spécialiste du peintre.
Dans ses écrits il en parle
comme du seul portrait qui existe de lui. Ce n’est
pas vrai, mais c’est sans doute celui qu’il préfère.
Girodet a compris son modèle, son état d’esprit,
et une sympathie s’est développée entre eux.
»
On situe les séances de pose entre juillet et
août 1808, quand une grave maladie contraint
Chateaubriand à quitter la Vallée-aux-Loups pour
Paris. Le portrait est exposé au Salon de 1810
sous le titre
Un homme médite sur les ruines de
Rome
. Selon lesmémoires de Chateaubriand, face
à lui Napoléon se serait exclamé : « Il a l’air d’un
conspirateur qui descend par la cheminée ».
Un modello de la main du maître
L’original du portrait le plus célèbre de l’écrivain
Cet automne, uneœuvremajeure fait son entrée dans les collections dumusée. Un
tableau inédit, fruit de la rencontre entre deux géants du XIX
e
siècle.
Chateaubriand par Girodet
© CD92/Willy Labre