Revue Vallée de la Culture n°8 - page 109

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préceptes de l’hygiénisme alors en plein essor. Et s’il
s’astreint ainsi à entretenir sa vitalité physique et psy-
chique, cen’estpas pour lui-même : il veut être en capacité
de mener à bien la mission philanthropique planétaire
dont il se sent investi.
L’ensemble forme un curieux mélange de rationalité
positive et de spiritualisme teinté de mysticisme. À cet
égard, son attitude vis-à-vis de la religion est révélatrice.
Il a en effet confié à son ami le poèteTagore avoir cons-
truit sa foi par lui-même, comme sa fortune : il commença
par soumettre toutes les croyances (y compris celle qui
lui était le plus chère, le judaïsme de son enfance) à
l’épreuve de la raison, qui les rejeta presque entièrement.
Mais
« un soir, alors qu’il séjournait dans sa villa du sud de
la France […], il tomba à genoux en regardant les étoiles et
en s’interrogeant sur la réalité ultime. Alors subitement lui
vint une vision : il vit la réalité elle-même ; il ne peut exprimer
ce qu’elle était, si ce n’est que l’expérience était merveilleuse.
Il ne peut l’expliquer –mais il sait qu’il l’a vue. »
6. Le banquier est-il collectionneur d’art ?
Kahn offre une image éloignée de celle du grand
bourgeois collectionneur, au cadre de vie opulent, où se
côtoient œuvres anciennes et modernes. S’il est proche
d’amateurs d’art (Paul d’Estournelles de Constant, les
banquiers JoannyPeytel et Goudchaux), il ne possède pas
leur culture artistique. Il vapourtant s’entourer dequelques
pièces, acquises à l’occasion de relations amicales.
Lorsqu’il rencontre vers 1895 François-Rupert Carabin, il
est sûrement sensible à sa personnalité indépendante.
L’artiste est lui aussi un enfant de la campagne savernoise
ayant connu le traumatisme de la guerre de 1870. Kahn
gardera toute sa vie cemobilier inclassable, entre ébénis-
terie et sculpture, que la critique avait encensé ou exécré.
Mais c’est le travail du marbre par Rodin qui le séduit
avant tout. Il achète au sculpteur des œuvres pour lui-
même et pour offrir. Il se fait volontiers l’intermédiaire
de clients de l’artiste. Grâce à son cofinancement, il rend
possible lagrande rétrospectiveRodin, organiséeenmarge
de l’Exposition universelle de 1900.
Kahn possédait aussi deux tableaux du peintre symbo-
liste Eugène Carrière, ami intime de Rodin ; vers 1930,
il confie la décoration de sa villaMiramar du capMartin
au peintre bretonMathurinMéheut.
7. Quels sont les axes de sa philanthropie ?
Bien que ses actions philanthropiques aient dépassé le
domaine de l’enseignement, Albert Kahn demeure le
bienfaiteur de l’université de Paris qu’il désigne pour léga-
taire universel.
Le point de départ de ses libéralités envers l’État est l’ins-
tauration de bourses de voyage pour jeunes agrégés en
1898, en pleine affaire Dreyfus. Cette première fonda-
tion estau début anonyme, alors que le don public à des
Son amour des animaux
le portera à accepter
une seule fois qu’une
caméra entre dans
son hôtel particulier,
pour le filmer (on voit
son ombre) en train de
nourrir sa petite chienne.
Autochrome 12 x 9 cm
de Roger Dumas,
Boulogne, 1925.
L’Éternel printemps
:
probablement le premier
marbre de Rodin acquis
par Kahn, en 1896
(auj. coll. privée).
Plaque noir & blanc
9 x 12 cm, opérateur
non mentionné, s. d.
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© Musée Albert-Kahn - Département des Hauts-de-Seine
© Musée Albert-Kahn - Département des Hauts-de-Seine
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