Le guide Vallée-Culture Hauts-de-Seine n°27 - page 14-15

découvrir lemonde, l’autre, avec le souci de donner
une représentation qui soit une construction
culturelle. Les opérateurs partaient avec des
instruments nouveaux, ils rapportaient des in-
formations documentaires plutôt que des faits
divers. Autre point commun, leurs images ne se
lisent pas toutes seules, elles font sens dans un
ensemble. C’est intéressant demettre en parallèle
cette idéedeconstruireunereprésentationparfois
même à travers de la fiction. Le travail de ces
photographes fait écho à l’utopie documentaire
d’Albert Kahn.
Quel regard portez-vous sur le projet d’Albert
Kahn d’Archives de la Planète ?
C’est un véritable joyau de l’histoire de la photo-
graphie. Ce qui me fascine, c’est son inscription
dans les grandes utopies de la photographie. La
photographie naît en 1839 avec le daguerréo-
type. Lorsqu’il présente ce procédé à l’Académie
des Sciences, François Arago, scientifique et
député, fait un discours où il liste à quoi va servir
la photographie, dressant un grand programme
utopique. L’œuvre d’Albert Kahn utilise la couleur,
le voyage et la documentation. Au début du
XX
e
siècle, il remplit les conditions de cette utopie.
Cette collection n’a pas d’équivalent dans le
monde. Nous sommes beaucoup à nous réjouir
du nouveau bâtiment qui va voir le jour et des
projets scientifiques à venir dans ce lieu qui est
déjà important pour la photographie, mais qui va le
devenir plus encore, en France et dans le monde.
Que vous inspire le fait que lemusée s’ouvre à la
photographie contemporaine ?
On ne peut pas travailler sur des archives sans en
montrer l’actualité. Je travaille beaucoup avec des
artistes contemporains : ils intègrent le patrimoine
dans leur démarche, ils s’intéressent énormément
à l’histoire et aux collections. Travailler avec le
patrimoine, le faire vivre, c’est le faire dialoguer le
plus possible avec le contemporain.
Michel Poivert donne une conférence au musée
le 4 octobre (informations pages suivantes)
Michel Poivert
enpratique
Le festival « Les âmes grises,
récits photographiques d’après-
guerre»
Du12 août au14 septembre
«Théâtres : récits ritualisés»,
Vasantha Yogananthan et Emeric
Lhuisset
Du16 septembre au26octobre
«Monuments : récits nationaux»,
Patrick Tournebœuf et Bertrand
Carrière
Dumardi au dimanche de11h à 19h
jusqu’au30 septembre, jusqu’à 18h en
octobre
Tarif : 4€ - Tarif réduit : 2,50€
Gratuit le1er dimanche de chaquemois
allers-retours.hauts-de-seine.net
albert-kahn.hauts-de-seine.net
focus
Festival photographique en plein air «Allers-Retours »
jusqu’au 26 octobre
«Construireunereprésentation»
Michel Poivert, historien d’art, professeur à l’université Paris I Panthéon-Sorbonne,
co-directeur dumaster Histoire de la photographie à l’École du Louvre, revient sur le
festival et ses liens avec le projet d’Albert Kahn.
Que retenez-vous de ce festival dephotographie
contemporaine ?
Je suis sensible au fait de regrouper des artistes
contemporains qui associent leurs représenta-
tions à des événements en général plutôt traités
par le photojournalisme. Ils décalent leurs points
de vue et réfléchissent à des dimensions plus
culturelles, plus profondes. Leurs regards sur l’his-
toire contemporaine s’articulent autour de la mé-
moire et de la mise en scène. Ce qui est troublant,
c’est de se demander si l’histoire contemporaine
n’est pas mieux traitée par ces photographes qui
prennent du recul et fabriquent des représenta-
tions plutôt que par les images que l’on voit dans
les journaux. Finalement, le monde contemporain
ne serait-il pas mieux expliqué par des points de
vue distanciés ?
Voyez-vous un lien entre ces artistes et les opé-
rateurs d’Albert Kahn au début du XX
e
siècle ?
C’est à la fois incomparable et comparable. Je
vois un lien dans l’idée que l’on va très loin pour
© Andrea Eichenberger, 2012
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Albert-Kahn, musée et jardin départementaux
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