PSYCHO
Souvent liée à l’entrée au collège, la demande d’argent
de poche est moins anodine qu’il n’y paraît – tant
pour les parents que pour les enfants. Les conseils
de Gilles Barraband, le psy de l’abeille.
À la rentrée, les parents de Sofia ont
commencé à lui donner un peu d’argent de
poche, une fois par semaine. Sofia est toute
fière, et il y a de quoi ! Comme le souligne
Gilles Barraband, pédopsychiatre,
« recevoir
de l’argent de poche, pour un ado, c’est
comme avoir le droit de prendre le bus tout
seul ou pouvoir donner son avis sur les
vêtements qu’on lui achète : c’est le signe
qu’il a grandi et qu’il gagne en autonomie
par rapport à ses parents. »
Cet argent de poche appartient à l’adolescent.
Il ne doit pas servir à répondre à un besoin,
comme financer les transports ou payer ses
repas à la cantine.
« Cet argent permet à
l’enfant de satisfaire certains de ses désirs,
comme acheter ce que ses parents
n’achèteraient pas spontanément, des
friandises ou des mangas par exemple »,
insiste Gilles Barraband. L’ado doit pouvoir
utiliser cet argent comme bon lui semble,
sans que ses parents décident pour lui.
Il est important qu’il puisse faire des choix
– et avoir le droit de se tromper. À lui
d’apprendre à ne pas tout dépenser
d’un coup, mais aussi à mesurer ce qui vaut
la peine d’être acheté.
« Les ados réclament souvent des produits
très chers, les fameuses “marques” dont ils
pensent qu’elles les mettent en valeur. En
gérant leur argent de poche, ils découvrent
que le prix d’un bien est en proportion de
l’effort qu’il faut faire pour économiser
l’argent pour son achat,
puis pour se séparer de cette somme »,
poursuit le pédopsychiatre. Cet
apprentissage n’est pas aussi
simple qu’il n’y paraît.
Gilles Barraband a
remarqué que les enfants
perdaient parfois leur
argent. Pour lui, ce n’est
pas un hasard, plutôt un
acte manqué.
« Avoir de
l’argent de poche n’est pas
si évident que cela, au début.
Comme tout ce qui permet de
progresser, c’est à la fois une
source de plaisir et d’inquiétude. En
avoir, c’est aussi risquer de le
perdre, et d’être triste. Mais il faut
aussi passer par ce genre
d’expériences pour grandir »,
explique-t-il.
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N° 26
JUIN 2015
QUESTIONS / RÉPONSES
Gilles Barraband,
pédopsychiatre et
psychanalyste, est secrétaire général de la
Maison des adolescents des Hauts-de-Seine.
Ma mère ne me donne de l’argent
de poche que si j’ai de bonnes notes
à l’école. Je trouve cela injuste.
Que faire?
Gilles Barraband :
Il faut que tu discutes
avec ta mère de ce que vous entendez par
« argent de poche ». Est-ce une récompense
pour quelque chose que tu as réussi ? Dans ce
cas, c’est un cadeau, et ta mère décide à quelles
conditions tu y as droit. Ou est-ce une somme
d’argent qu’elle te donne car elle pense que,
à ton âge, tu es capable de l’utiliser
de façon raisonnable? Si c’est le
cas, elle devrait t’en donner
quelles que soient
tes notes.
Virginie, 12 ans
MAMAN,
PAPA…
JE PEUX AVOIR DE
L’ARGENT DE POCHE?