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montrouge
Contemporains
I
maginés par la designer matali crasset,
chargée de la scénographie et de la signalétique du Salon
depuis 2009, ces totems évoquent l’univers végétal cher
à la créatrice, mais plus que des arbres ils ressemblent à
des bougies dont la flamme vacillerait sans s’éteindre,
nourries plutôt quemenacées par le soufflenouveaud’art
frais convoqué ici pour l’occasion...
Alberola, par anticipation
Dédié exclusivement à l’émergence de nouveaux talents
depuis 1976, un événement comme le Salon de Mont-
rougene peut célébrer sonanniversaire qu’en se projetant
vers le futur. Avec la volonté d’approfondir ses missions
de découverte et d’accompagnement, le Salon 2015 a
multiplié les clins d’œil et les chassés-croisés avec son
histoire.Ainsi, l’invité d’honneur choisi pour cette soixan-
tième édition est-il Jean-Michel Alberola. S’il a participé
au Salon au tout début de sa carrière (en 1981, 1982 et 1983,
la Ville acquérant à cette occasion une de ses œuvres
importantes), il est aujourd’hui reconnu comme une
référence par une foule de jeunes artistes : professeur à
l’École Nationale Supérieure des Beaux-Arts de Paris, il
possède une sens aigu de la transmission. L’ambitieuse
exposition qu’il réalise pour le Salon, dans les trois cent
cinquantemètres carrés de l’ancien foyerArtDéco, relève
même de l’anticipation : elle préfigure en effet la rétros-
pective que lui consacrera le Palais deTokyo à l’hiver 2016.
De nombreux autres « anciens »du Salonont saisi l’occa-
sion de cet anniversaire pour renforcer le lien avec la
manifestation qui les a vus débuter. Sur les parois vitrées
de l’ascenseur duBeffroi, une soixantaine d’entre eux sont
ainsi intervenus, jouant avec la transparence et la verti-
calité du support, pour élaborer une œuvre collective
oscillant entre le patchwork et le cadavre exquis. Les inter-
ventions, parfois conçues à quatremains, permettent aux
visiteurs de retrouver certains des artistes les plus
marquants de l’histoire du Salon, dont quelques lauréats
comme Julien Salaud, Nathalie Boutté ou Louise
Pressager.
Irrigation dans la ville
Anniversaire oblige, en 2015 l’art déborde du cadre du
Salon pour irriguer toute la ville, depuis longtemps
compagne des arts, patrie de Robert Doisneau, Moebius
ou Vasarely, qui a même un temps abrité Pablo Picasso.
Dès la sortie du Métro Mairie de Montrouge, le passant
est happé par la créationmurale monumentale de Jean-
Michel Alberola, qui l’incite à « reprendre la conver-
sation ». Dans le square de l’Hôtel deVille, SimonNicaise
a planté son stand de glaces d’un genre particulier. Avec
Museomorphic
, il propose aux visiteurs comme aux
passants de modeler puis d’ingérer les chefs d’œuvre de
la sculpture classique ici disponibles dans une version
inhabituelle : des esquimaux au citron ! Aussi singulières
et énergisantes sont les interventions in-situ concoctées
par les autres anciens du Salon sous forme de « cartes
blanches » dans les parcs et jardins de la Ville : de la
fontaine Dolly des None Futbol Club (lauréats du Prix
du conseil départemental des Hauts-de-Seine en 2013) à
la « sculptured’urgence» aériennede StéphanieCherpin,
en passant par le table de ping-pong façon rocaille dix-
neuvième de Stéphane Vigny. En prenant la mesure de
l’espace public, le Salon deMontrouge fait joliment écho
à cette«valléede la sculpture»quedeviennent lesHauts-
de-Seine, de la « Tour aux Figures » de Dubuffet, aux
somptueuses commandes artistiques de La Défense,
rejointes éphémèrement chaqueétépar les créations ultra-
contemporaines de « Sèvres Outdoor ».
Vision kaléidoscopique
Présidé par le scénariste et réalisateur Olivier Assayas,
marqué par la présence de plusieurs écrivains et roman-
ciers dans le Collège critique qui a accompagné le choix
des soixante exposants parmi les trois mille postulants,
cettenouvelle livraisonduSalonestmarquée par le grand
retour des « récits ». Historiques ou contemporains, uni-
versels, communautaires ou intimes, ils sont le véritable
fil rougede cette édition-anniversaire. Plus qu’une photo-
graphie de la création contemporaine, le Salon s’affirme
comme une vision kaléidoscopique additionnant les
regards demultiples créateurs sur lemonded’aujourd’hui,
dont ils délivrent, à la manière des peintures cubistes,
un portrait simultané sous toutes les facettes.
n
Mathieu Roquigny,
Prix Kristal,
sous le regard de Jean-
Loup Metton, maire de
Montrouge, Patrick
Devedjian, président du
conseil départemental et
Olivier Assayas,
président du jury.
(De gauche à droite)
Stéphane Corréard,
commissaire du Salon
depuis ECCL.
© CD92/Olivier Ravoire
© CD92/Olivier Ravoire